Quand on voit certaines vieilles vidéos de présentation des mouvements de kettlebell, le style semble très éloigné de ce qu'il en est aujourd'hui.

Le kettlebell swing, mouvement phare de l'entraînement avec kettlebell, a connu une évolution significative depuis sa redécouverte au tournant du siècle. Certaines vidéos de l'époque semblent montrer une technique qui ne passerait pas les standards du hard-style aujourd'hui. A-t-on présenté une mauvaise technique à l'époque ?

Voyons un peu l'évolution de la technique kettlebell en un quart de siècle.

Origines et évolution du kettlebell swing

Lorsque Pavel, pionniers de la redécouverte du kettlebell en Occident, présentait ses premières démonstrations dans les années 1990, la technique du swing telle qu’on la connaît aujourd’hui était encore peu codifiée. Les vidéos d’époque, souvent sur VHS, montraient un swing qui avait un aspect plus lent, plus « balancier », avec même une poignée passant en-dessous du niveau des genoux, un dos moins placé. Ces swings seraient aujourd’hui considéré comme « hors standard » dans certaines écoles. Il correspondaient toutefois à un contexte particulier : celui d’un mouvement redécouvert et réintroduit dans les programmes d’entraînement.

À cette époque, le kettlebell était un instrument presque inconnu en dehors d’un cercle restreint de pratiquants. L’apprentissage était empirique, basé sur l’observation et la transmission orale, avec une exploration constante des limites et des possibilités du mouvement. Il ne s’agissait pas encore d’une pratique codifiée. Par conséquent, la technique du swing était plus ouverte.

Au fil des années, à mesure que le kettlebell gagnait en popularité, deux grands styles ont émergé, chacun avec des objectifs distincts :

  • Le style hard style : axé sur la puissance, l’explosivité et le renforcement dynamique, avec une intensité élevée et une dépense énergétique importante.
  • Le style Girevoy Sport (GS) : orienté vers l’endurance, l’efficacité énergétique, et la capacité à maintenir un mouvement répétitif pendant de longues périodes.

Ces deux styles ont façonné la manière dont le swing est enseigné et pratiqué aujourd’hui, aboutissant à des techniques très différentes malgré la base commune du mouvement.

Le swing hard style : puissance et renforcement dynamique

Le style hard style, tel qu’il est enseigné dans les écoles comme StrongFirst, met l’accent sur le travail de la flexion-extension de la hanche avec une charge, cherchant à maximiser la tension musculaire et l’explosivité au moment de l’extension. Ce style est énergivore et vise principalement à renforcer le corps de manière dynamique, en reproduisant un modèle de mouvement fondamental pour l’athlétisme et la vie quotidienne.

Le swing hard style ne cherche pas à être efficient au sens énergétique. Au contraire, l’objectif est de générer une forte activation musculaire et une explosion de puissance, ce qui implique une dépense importante. Cette approche est idéale pour :

  • Développer la force explosive des hanches.
  • Améliorer la posture et la stabilité dynamique.
  • Favoriser la résilience musculaire et articulaire.
  • Transférer cette puissance à des activités sportives variées comme la course, le saut ou les sports de combat.

Dans ce style, la technique a évolué pour privilégier une flexion de hanche plus marquée, mais aussi aussi tardive que possible. Cela entraîne notamment que la poignée kettlebell ne descend pas trop bas, et passe au-dessus du niveau des genoux au moment de la flexion. Le mouvement est plus explosif. Cette approche assure une activation élevée des muscles.

Les caractéristiques clés du swing hard style :

  • Flexion de hanche prédominante, avec une flexion des genoux limitée.
  • Extension explosive de la hanche pour propulser le kettlebell vers l’avant.
  • Maintien d’une posture rigide et stable du tronc (planche verticale).
  • Respiration synchronisée avec l’effort, avec une expiration forcée lors de l’extension.

Ce style, s’il est énergétiquement coûteux, est parfaitement adapté aux objectifs de renforcement musculaire, de développement de la puissance et d’amélioration de la capacité fonctionnelle globale.

Le swing Girevoy Sport : efficience et endurance

En parallèle, le style Girevoy Sport (GS) s’est répandu avec des objectifs très différents. Le GS est une discipline compétitive qui consiste à réaliser un nombre maximal de répétitions de swings, snatches ou clean and jerk dans un temps donné, souvent 10 minutes ou plus. L’objectif principal est donc l’endurance musculaire, ce qui passe par une gestion optimale de la dépense énergétique.

La technique GS privilégie une exécution efficiente, avec un mouvement fluide, un trajet du kettlebell différent et une flexion des hanches moins prononcée que dans le hard style. Le but est de minimiser la fatigue en économisant l’énergie, tout en maintenant une cadence régulière et durable.

Les caractéristiques principales du swing GS sont :

  • Une moindre flexion de hanche
  • Un trajet du kettlebell différent
  • Un rythme régulier, favorisant la conservation de l’énergie sur la durée.
  • Une respiration généralement anatomique (expiration en flexion, inspiration en extension)

Cette approche est idéale pour ceux dont l'objectif est de participer à des compétitions de GS (endurance kettlebell).

Le style GS privilégie donc l’efficience et la durabilité, au détriment d’une intensité explosive immédiate.

Pourquoi cette « bataille » sur la bonne technique ?

Avec la popularité croissante du kettlebell, on assiste souvent à des débats passionnés sur la « bonne » ou la « mauvaise » manière d’exécuter le swing. Sur internet, dans les commentaires ou forums, des « guerriers du clavier » s’affrontent pour défendre leur style, critiquant sans réserve les techniques différences.

Mais cette confrontation oublie souvent un élément fondamental. Le contexte et l’objectif derrière chaque mouvement. La technique ne peut être jugée isolément, sans prendre en compte :

  • Le but de l’entraînement (force, endurance, rééducation, mobilité, etc.).
  • Le niveau et les capacités physiques du pratiquant.
  • Les contraintes morphologiques individuelles.
  • Les conditions d’exécution (charge, cadence, durée).

Il est donc stupide d'imposer une seule technique comme la vérité universelle. Ce qui est correct dans un contexte peut ne pas l’être dans un autre.

Quelqu'un qui pratique le GS devra s'entrainer dans le style GS.

L'évolution du swing hardstyle

Pour en revenir aux vidéos des premiers swings hard-style, on peut être étonné que leur forme ne soit pas vraiment hard-style avec les critères actuelle de ce style.

Mais en fait, les fondamentaux sont déjà là. Une extension assez forte des hanches, avec une planche verticale solide. Un début d'explosivité (à l'opposé de ce qu'on a en style GS). Par contre, au fur et à mesure que les années passaient, et que de plus en plus de pratiquants et de coachs enseignaient ce mouvement, les détails se sont rajoutées. Le mouvement a été observé, analysé, enseigné à des milliers de pratiquants.

La compréhension de sa bio-mécanique s'est amélioré. Les différents drills pour en améliorer l'apprentissage aussi. Et c'est ainsi que sont nés des standards du swing hard style. Et que ceux-ci ne sont toujours pas figés.

L’évolution du « relevé » avec kettlebell : un exemple d’adaptation

Le kettlebell swing n’est pas le seul mouvement à avoir évolué. Le « relevé », mouvement consistant à se relever avec un kettlebell en main, a également connu des changements importants depuis ses débuts.

Au début des années 2000, le relevé était présenté de manière assez libre : on saisissait le kettlebell au sol et on se relevait sans protocole strict, tant que le mouvement restait sûr et contrôlé. Ce mouvement, introduit par Steve Maxwell, avait l’avantage d’associer mobilité, renforcement et travail autour de l’épaule.

Au fil du temps, l'enseignement du mouvement à la population générale a amené à codifier ce mouvement, avec des étapes bien précises et un standard. Il s'agit d'UN standard et d'UNE manière d'enseigner le mouvement, qui correspond bien au besoin de la population générale. Il ne s'agit pas de l'unique manière correcte de faire le relevé, mais de celle qui permet le mieux de l'enseigner à un novice.

D'ailleurs, il existe plusieurs variantes du relevé (j'en présente plusieurs dans mon cours en ligne sur le relevé, accessible avec mes programmes Quintessence). mais plutôt que certaines formes sont privilégiées pour maximiser la sécurité et les bénéfices.

Le coaching joue ici un rôle crucial pour adapter le mouvement à chaque individu, en tenant compte de ses besoins spécifiques.

La question fondamentale : pourquoi fait-on ce mouvement ?

Plutôt que s’attarder sur la bonne technique, il faut  revenir à la question essentielle : pourquoi fait-on ce mouvement ?

Cette interrogation guide le choix de la forme d’exécution, du style, de la charge, de la cadence et de la durée.

Par exemple, si l’objectif est de préparer une compétition de Girevoy Sport, la technique sera orientée vers ce style. Evidemment.

Si l’objectif est de renforcer la puissance des hanches pour améliorer ses performances en course ou pour un sport spécifique, on privilégiera le hard style.

Si l’objectif est la santé générale et la mobilité, mon avis est que le style hard-style est le plus adapté pur la population générale. C'est un avis et un choix, pas une vérité absolue.

Il n’existe donc pas une seule « bonne » manière de faire, mais plusieurs variantes adaptées aux objectifs. La clé réside dans la compréhension de ce pourquoi.

Les différences morphologiques : un facteur clé souvent négligé

Un autre aspect fondamental dans la variation des techniques est la morphologie individuelle. Chaque personne a des caractéristiques anatomiques uniques : longueur des membres, mobilité des hanches, souplesse des épaules, structure osseuse, etc. Ces différences influencent la manière dont un mouvement peut être exécuté de manière optimale et sécuritaire.

L’importance du coaching dans la maîtrise du kettlebell 

Face à la multiplicité des styles, des objectifs et des morphologies, le rôle du coach est primordial. Un bon entraîneur saura :

  • Analyser les besoins et objectifs du pratiquant.
  • Évaluer les capacités physiques et les limitations morphologiques.
  • Proposer des variantes adaptées de la technique.
  • Corriger les erreurs pour éviter les blessures.
  • Encourager la progression en respectant le contexte personnel.

Le coaching personnalisé permet d’éviter les pièges des vidéos génériques sur internet qui montrent souvent de façon dogmatique une seule façon de faire, sans tenir compte des spécificités individuelles et des objectifs du mouvement.

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About the author 

jef

Jean-François "jef" Lopez accompagne depuis 2016 des cadres et dirigeants occupés sur le chemin de la forme durable.
Ancien sportif autour de la vingtaine, devenu gros, faible et complètement hors de forme autour de la trentaine, Jean-François a décidé de réagir et de retrouver la forme.
Lors de cette quête, il a été amené à changer son approche de la remise en forme.
De nombreuses rencontres avec les meilleurs instructeurs de la planète, dont Pavel Tsatsouline, l'ont en effet convaincu que le paradigme de la souffrance et de l'effort démesuré n'était pas le plus adapté pour durer. C'est comme cela qu'est né le concept de "forme durable".
En plus de son expérience personnelle, Il se forme continuellement, et est ainsi devenu instructeur certifié StrongFirst Elite (SFG2, SFB, SFL), spécialiste du mouvement fonctionnel et de la souplesse (FMS2, FCS, YBT, Flexible steel niveau 2), expert en respiration (instructeur avancé Oxygen advantage, praticien Buteyko) et coach en nutrition (PN).
Il est également détenteur d'une certification d'entraîneur personnel (ACE-PT, accrédité par la NCCA) et inscrit au registre européen des professionnels du sport EREPS.

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